Chapitre n° 38
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Chapitre 38.
L’aventure attend au tournant de la route.
Le lendemain, Marilla se rendit en ville comme prévu et revint le soir même. Anne avait accompagné Diana à Orchard Slope; au retour, elle trouva Marilla dans la cuisine, la tête dans les mains, assise devant la table. Il y avait quelque chose dans son attitude abattue quelque chose
— Es-tu très fatiguée, Marilla? »
qui donna le frisson à la jeune fille. Elle n’avait jamais vu Marilla aussi inerte.
— Es-tu très fatiguée, Marilla?
— Oui… non, je ne sais pas, répondit Marilla d’une voix monocorde, en levant les yeux vers elle. Sans doute suis-je fatiguée, mais ce n’est pas ça qui me préoccupe.
— Tu as vu l’oculiste? Qu’est-ce qu’il a dit? s’enquit Anne, avec anxiété.
— Oui, je l’ai vu. Il m’a examiné les yeux. Il m’a dit que si j’arrêtais complètement de lire et de coudre et
ANNOTATION PHOTO
« The Bend in the Road » (le tournant de la route) : dans un de ses premiers cahiers de coupures, Montgomery a collé (de travers) une copie du poème de Grace Denio Li[t]chfield intitulé « The Bend of the Road », publié d’abord dans la revue Century en 1901. Au-dessus, elle a collé une carte imprimée montrant un tournant dans une route. Le poème de douze vers commence en disant : « Oh ce tournant dans la route, comme il est déroutant et pourtant attirant! / Qui a-t-il au-delà, moins ou plus que le cœur ne le pense? » et se termine ainsi : « Bien que le chemin soit solitaire, vide de chants, vide de rires, / -- Je dois aller jusqu'au bout - Je dois savoir ce qui s’y trouve! »
L'image, si ce n'est le poème lui-même, avait un fort pouvoir de fascination pour Montgomery (cahier de coupures rouge, p. 26; Imagining Anne, 132). On ne sait pas si elle a vu le poème avant ou après avoir créé son propre (et très différent) moment et sa propre image du « tournant de la route » dans Anne.
Centre des arts de la Confédération