Chapitre n° 30
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plus à moins que Mlle Stacy ou Mme Allan les jugent convenable pour une fille de treize ans et trois-quarts. Mlle Stacy me l’a fait promettre. Elle m’avait surprise en train de dévorer Le mystère de la salle Le Mystère macabre du manoir hanté, que Ruby Gillis m’avait prêté. Oh, Marilla, c’était tellement fascinant et terrifiant! J’en avais le sang qui se figeait dans les veines. Mais Mlle Stacy m’a affirmé que c’était un livre stupide et fort malsain, et elle m’a demandé de ne plus lire d’histoires du même genre. Cela ne me faisait rien de promettre de ne plus en lire à l’avenir, mais je dois dire que j’étais à l’agonie d’avoir à lui rendre ce livre-là sans en connaître la fin. Malgré tout, mon affection pour Mlle Stacy a résisté à l’épeu épreuve et j’ai rendu le livre. C’est tout à fait fantastique, Marilla, ce que l’on parvient à faire pour s’attirer les faveurs de quelqu’un qu’on aime particulièrement.
ANNOTATION TEXTE
« Lurid Mystery of the Haunted Hall » (Le mystère macabre du manoir hanté) : titre inventé qui fait penser à nombre de romans gothiques qui, bien qu’extrêmement populaires à compter du 17(commencer superscript)e(fin superscript) siècle, étaient mal vus par des lecteurs plus avisés. Les romans gothiques se déroulaient généralement dans des châteaux et des abbayes, avec des thèmes surnaturels ou religieux et une prose sensationnelle ou mélodramatique. La parodie de ce genre de Jane Austen, Northanger Abbey [L’Abbaye de Northanger] (1818), illustre l’effet (humoristique) que la lecture de trop de romans gothiques a sur sa jeune héroïne. Austen a été influencée par de nombreux autres romans dont Horrid Mysteries (1796).