Chapitre n° 28
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Chapitre 28.
Une pauvre belle au teint de lis
— Bien sûr que c’est toi qui dois jouer Elaine, Anne, dit Diana. Moi, je n’aurais jamais le courage de me laisser flotter jusque là-bas.
— Moi non plus, fit Ruby Gillis avec un petit frisson. Cela m’est égal de me laisser porter par le courant lorsque nous sommes deux ou trois dans la barque (commencer subscript)^(fin subscript)(commencer superscript)et que nous pouvons nous asseoir(fin superscript). C’est bien amusant. Mais s’étendre sur le fond plat, faire semblant d’être morte, non, je ne pourrais pas. J’en mourrais de frayeur, pour de bon!
— Bien sûr que ce serait romantique, admit Jane. Mais je sais bien que je ne pourrais pas rester immobile. À chaque instant, je lèverais la tête pour voir où je suis et m’assurer que le courant ne m’entraîne pas trop loin. Et tu sais bien, Anne, que ça gâcherait tout.
— Mais, dit fit Anne d’un air désespéré, une Elaine aux cheveux rousse serait complètement ridicule! Je n’ai pas peur, moi, de me laisser flotter et c’est vrai que j’adorerais être Elaine. Mais c’est quand même ridicule. C’est Ruby qui devrait faire Elaine parce qu’elle
ANNOTATION TEXTE
424 498 : un autre chapitre renuméroté au crayon
ANNOTATION TEXTE
« Lily Maid » (belle au teint de lis) : dans ce chapitre, l’imagination d’Anne ainsi que le titre du chapitre ont été inspirés par le long poème de Tennyson intitulé « Lancelot and Elaine » (Lancelot et Elaine). Le poème fait partie du cycle de poèmes datant de 1859 intitulé Idylls of the King (Les idylles du roi), au sujet du Roi Arthur et des chevaliers de la Table ronde. Les premiers vers du poème sont « Elaine the fair, Elaine the loveable, / Elaine, the lily maid of Astolat, / High in her chamber up a tower to the east / Guarded the sacred shield of Lancelot » (Elaine la belle, Elaine la charmante, / Elaine, la jeune fille au teint de lis d'Astolat, / Haut dans sa chambre, sur une tour à l'est, / Gardait le bouclier sacré de Lancelot.) Elaine meurt d'un amour non partagé pour Lancelot, et sa barge funéraire flotte vers Camelot pour lui livrer un dernier message.
Tennyson s’est d’abord intéressé au Roi Arthur dans les années 1830, publiant deux versions de son poème « The Lady of Shalott » (La dame de Shalott), un en 1833 et l’autre en 1842. Il est question d’Elaine et de la « Dame » dans ce chapitre et toutes deux sont utilisées dans des adaptations diverses dans le roman.